(si, c'est la vraie cour de mon vrai lycée-prépa, seuls les initiés savent)
(avant on était au sixième étage dans la partie orange tout en haut à gauche sur la photo)
(oui, parce qu'il y a un sous-sol où se trouve l'entrée, je sais encore compter jusqu'à 6 merci)
(allé, maintenant je veux les arguments des anti-filières littéraires : qui a dit que la L c'était facile et qu'il n'y a que des rêveurs ?)
Et là, je me sens soulagée, je n'ai plus à me dire que je ne peux pas l'éviter, que je ne le comprends pas et que je ne sais pas comment je vais faire ma dissertation, pas de crises d'angoisses
diurnes et nocturnes, pas de termes qui paraissent d'un coup fort vicieux et teigneux, que le français lui-même devient une langue étrangère...
Et je me sens bien...
D'ailleurs, mon entourage me le dit : j'ai l'air plus détendue, pétillante, drôle, en pleine forme...
C'est là aussi que je réalise à quel point il faut être fou, maso, irréaliste, à quel point il faut de la volonté pour se lancer dans des études de classe préparatoire (littéraire ou pas), sans
parler de la trentaine d'heures de cours par semaine (avec en plus des DST allant de trois à six heures), des mille et un livres à lire dans toutes les matières, des notes pourries qu'on se
récolte tout en faisant partie de "l'élite" de la France et en remerciant presque le prof d'avoir prêté attention à notre misérable copie, des critiques pas toujours évidentes de ces derniers
(que je continue de vénérer au loin)(d'accord, j'exagère) et des délicieuses heures de khôlles...
(avec en souvenir, la fameuse réplique d'un des membres du personnel se trouvant généralement à l'accueil du lycée : "Ah, vous venez parce que vous êtes collée, mais vous avez fait quoi pour être
collée ?", mais non Monsieur, pour la millième fois, une "khôlle", arrivé en prépa, ce n'est plus une "punition" (hum hum), c'est une "interro orale"... On sent que les mots ont du mal à
sortir... Expliquant la tête un peu ahurie et pas très convaincue de Monsieur...)
J'aimerais aussi évoquer les tristounets préfabriqués nauséabonds où nous avons trouvé refuge pour échapper au froid rigoureux où nous étions condamnés de notre sixième étage où le chauffage
n'arrivait jamais et qui nous ont aussi éviter de nous faire 24 étages par jour tous les jours...(6 pour aller en cours, 6 pour aller à la cantine, 6 pour retourner en cours, 6 pour retourner
chez nous, avec toujours la sensation vertigineuse que les escaliers ne s'arrêteront jamais, et entendre quand on a 5 minutes de retard en philo "c'est trop tard, merci")
Les piques niques sympathiques sur la piste de sport, notre petit CDI privé où trois livres d'histoire se battent en duel avec deux livres de français (qui va gagner ?!), les élèves et les profs
qui ignorent tout de notre existence, la cantine et ses petits poids carrés, les dames de la loge qui nous font pleurer quand on arrive en retard...
Les délires du prof de philo qui se met à dessiner des fleurs au tableau parce que c'est joli, du prof de géo qui nous refait La Cage aux Folles, les absences momentanées du prof
d'anglais en plein cours, la prof de français qui rêverait de nous faire le contenu de 6 heures de cours en seulement 3 heures, la prof d'histoire qui nous parle des rois "Le roi meurt, VIVE LE
ROI","comment ça, je vous ai donné le devoir pour après les vacances ?! mais non, je vais m'ennuyer sinon... Allé, je les veux tous pour vendredi !", de la prof de latin qui va s'arracher les
cheveux (enfin, surtout les notres soyons honnêtes) parce qu'on est nul en grammaire et qu'on a choisi latin au lieu de grec (c'est la même prof pour les deux matières, et on a cru comprendre
qu'elle préférait le grec), la prof d'allemand qui trouve ça normal et sain de nous donner à faire en trois heures la rédaction d'un commentaire et d'une analyse d'un article de presse, un thème,
une version en DST et 40 mots de vocabulaire et qui ne comprend pas pourquoi on y arrive pas...
(et beh, ça va qu'il y avait les piques-niques : merci chères déléguées)
Mais que de souvenirs !
Le pire dans tout ça, c'est qu'en tant qu'ancienne élève de classe préparatoire littéraire, je ne peux que vous conseiller et vous encourager à y aller, de tenter votre chance, et de donner le
meilleur de vous même !
Adieu prépa, adieu !
J'ai pris mes billets pour l'Angleterre (non, pas encore, ouh le vilain mensonge)
La prépa est morte souviens-t'en
Nous ne nous verrons plus sur ma chaise austère ( au fond de la clase, près de la fenêtre, juste à droite en entrant)
Odeur du temps grains de poussière
(oui, la classe est particulièrement poussiéreuse, mes camarades prédécesseurs, contemporains et successeurs peuvent en témoigner)
Et souviens-toi que je t'attends
(qui sait, peut être de l'autre côté du miroir ?)
[celui qui trouve de quel poème ce pastiche est inspiré gagne]
ENJOY !!! ^^